Orage destructeur et macrorafales le 25 juin 2025 dans l'Aveyron - Derecho

Publié le 5 août 2025 à 12:19

Rédigé par Roman Laval - Dossier en cours de création..

Chronologie des évènements

La journée du 25 juin 2025 débute avec un franc soleil dans le département de l'Aveyron, en fin de matinée, la température dépasse déjà les 30°C (localement 33 à 34°C). En milieu de journée, la température aura même dépasser les 35°C par endroits.

La journée était sous surveillance pour MeteoAveyron concernant des orages pouvant être violents dès la fin de journée et soirée suivante. Aux alentours de 18h, des orages monocellulaires (une seule cellule orageuse) se développent dans le cantal et prennent rapidement la direction du puy de dôme, allier, .. 

Aux alentours de 19h, d'autres orages certainement à caractère supercellulaires (on constate une légère déviation du flux) prennent la direction du Lot et de la Dordogne. Un autre orage qui a pris naissance au sud de Tarbes est également visible sur les images radar de 19h, l'orage remonte rapidement en direction d'Auch.

 

Aux alentours de 19h15, les éléments prennent une tournure bien plus virulente (on surveille à ce moment-là l'orage remontant d'Auch). En remontant en direction de Montauban, un second orage prend naissance à l'avant de l'orage principal, les deux orages fusionnent avant d'arriver sur la ville de Montauban. La structure de l'orage prend la forme d'un arc -> "bow echo" (écho en arc)

 

Un orage bow echo est un orage en forme d'arc (comme un arc de cercle) vu sur les radars météorologiques, qui est souvent associé à des vents très forts et destructeurs. Ce type d’orage peut provoquer des rafales de vent violentes et parfois des dégâts importants sur son passage.

 

*Formation d'un bow echo (https://www.tswisster.com/glossaire/bow-echo/

Un bow echo est généralement associé à :

  • des orages multicellulaires organisés en ligne,

  • de fortes rafales de vent destructrices (rafale descendante ou « downburst »),

  • un potentiel de dommages linéaires importants (arbres déracinés, lignes électriques coupées),

  • une progression rapide de la cellule orageuse.

 

Peu avant 20h, l'orage passe sur Montauban et fait une victime à Piquecos après la chute d'un arbre.

Aux alentours de 20h30, l'orage arrive dans le département de l'Aveyron où il provoque de nombreux dégâts comme par exemple à Galgan peu avant 21h et à Viviez aux alentours de 21h ou le phénomène semble avoir été le plus violent.

 

Témoignage de Nico Burd : 

"Il y à ce bruit qui se rapprochait de chez nous, on se demandait ce que c'était..  et on à même cru à une tornade, il semblerait que ce bruit soit finalement due à la chute de grêle."

 

Peut-on parler d'un système convectif de méso-échelle ?  

Un MCS désigne un ensemble d'orages multicellulaires et parfois supercellulaires dont la particularité est de couvrir une portion de territoire importante et produisant des précipitations convectives sur au moins 100 km à échelle horizontale. Le plus souvent, les MCS sont constitués par une ligne d'orages multicellulaires (ligne de grains), à laquelle s'adjoignent dans certains cas des formations supercellulaires soit en amont du système, soit en queue de ligne (extrémité sud de la ligne de grains).

(https://www.keraunos.org/recherche/comprendre-les-orages-pedagogie-vulgarisation/les-structures-orageuses/mcs-systeme-convectif-de-meso-echelle.html)

 

📏 Critères définissant un MCS

Critères Seuils typiques pour un MCS
Taille ≥ 100 km dans au moins une direction
Durée de vie ≥ 3 heures (généralement 6–12 h, voire plus)
Organisation Orages organisés (ligne, arc, masse)
Signature radar / satellite Noyaux intenses, formation en ligne ou en masse, souvent un système en arc ou circulaire

🔁 Types courants de MCS :

 

  • QLCS (Quasi-Linear Convective System) : ligne d’orages souvent associée à des bow echoes et des rafales violentes.

  • MCC (Mesoscale Convective Complex) : système convectif quasi-circulaire visible en imagerie satellite nocturne (spécifique avec des critères géométriques).

  • Bow Echo MCS : ligne courbée en arc à l’origine de vents destructeurs.

19h20 -> développement d'une nouvelle cellule à l'avant, l'orage fusionne.

Structure en "Bow echo" (forme d'arc) 

Animations Radar et images satellites - 25 juin 2025

L'image satellite nous montre l'étalement de "l'enclume" de l'orage : L’enclume est la partie supérieure aplatie d’un cumulonimbus qui se forme lorsque le courant ascendant rencontre la tropopause (limite entre la troposphère et la stratosphère). l'enclume Indique un orage mature. Sur l'image radar, on aperçoit également un "sommet pénétrant" , il s'agit d'un dôme nuageux qui dépasse au-dessus de l’enclume d’un cumulonimbus. Le sommet pénétrant est souvent provoqué par un fort courant ascendant permettant au cumulonimbus de se développer jusqu'à la stratosphère de façon temporaire. Le sommet pénétrant indique une convection intense et est souvent associé à de violents orages.

Sur l'image radar du 25 juin 2025 : 

- Sommet pénétrant à environ -70°C

Constatation des dégâts le 26 juin 2025

Au matin du 26 juin 2025, les premiers dégâts dû au passage de l'orage ont été constatées, en premier lieu au stade Camille Guibert de Decazeville ou les dégâts ont été importants. Une partie des tribunes du stade a été soufflé, des morceaux ont été éparpillés un peu partout, de nombreuses infrastructures ont été endommagées de façon importante dans cette zone.

Les morceaux de tôles étaient éparpillés autour de la zone et certains morceaux étaient enroulés contre des poteaux de métal. On constate que les éléments appartenant aux infrastructures ont été "étalés" comme "poussées". 

La première impression laisse penser à une possible tornade parce que certains éléments d'infrastructure étaient manquants tandis que les autres éléments (à côté de ceux manquants) étaient intacts. En réalité, il ne s'agit pas d'une preuve suffisante pour prouver le phénomène tornadique. De plus, il n'y a pas de sillage visible sur l'herbe du stade (ce qui est un très bon indicateur de tornade). Les éléments se contredisent et il est compliqué de déceler le vrai du faux. Il est néanmoins important de constater que les débris sont partis pour la plupart dans la direction de l'orage même si certains éléments restent troublants.

à quelques mètres du stade, d'autres dégâts sont recensées, sur des habitations et sur l'environnement (arbres déracinés, toitures arrachées, voiture détruite, ..

On constate que les dégâts semblent comme "groupés", il y à des zones qui n'ont subi aucun dégâts et des zones ayant subi de gros dégâts, le contrasté est marqué. (jets de vent plus intense à certains endroits, couloirs de dégâts sélectifs -> voir explications sur les macrorafales ci-dessous).

En direction du "mas de parra" 

À quelques kilomètres du stade, sur la trajectoire de l’orage, le cas d’une véranda sur une terrasse de maison est intéressant.

Le témoignage d’un couple de retraitées qui ont subi d’importants dégâts au niveau de leur habitation a pu être noté, la véranda notamment à semble-t-il été soufflé. Ils ont confié avoir vu l’infrastructure se lever, L’infrastructure a été étalée en plusieurs dizaines de morceaux dans un champ face à la maison (dans la même direction que l’orage) et certains éléments sont revenus dans le sens opposé (dont un qui semble s'être déposé à l’entrée de la maison.)

 


Après avoir regardé les images plusieurs fois et après avoir étudié ce cas sur le terrain et grâce à quelques explications complémentaires de l'observatoire Keraunos, la véranda aurait donc pu étre soufflé par une macrorafale (violente rafale descendante de l'orage). Les débris ont été projetés dans un seul sens (en direction d'un champ face à la maison), seul un ou deux débris ont été projetées dans le sens opposé ce qui encore une fois à rendu l'enquête de terrain complexe (tornade ??).

Ce qui rend l'enquête de terrain encore plus complexe demeure la topographie de la zone affectée qui est souvent constituée de vallées. 

à proximité de cette habitation, de nombreuses zones forestières ont été affectées, on constate que les arbres ont été cassés, d'autres sont torsadées, certains déracinés. On constate des zones avec un "couloir" d'arbres ayant subi des dégâts alors que certains autres arbres hors de cette zone n'ont subi aucun dommages. La topographie nous joue-t-elle des tours ? :

 

  • La topographie (vallon, ligne de crête, orientation des rues ou clairières) peut accélérer le vent dans certaines directions.

  • Par exemple, un couloir orienté dans l’axe du vent de la macrorafale va concentrer et amplifier la vitesse, pouvant créer un sillage destructeur.

 

  • Une macrorafale n’est pas un “mur de vent” uniforme : elle est souvent composée de plusieurs jets de vent plus intenses, séparés par des zones un peu moins fortes.

  • Ces jets peuvent créer de véritables couloirs où les rafales peuvent atteindre des vitesses extrêmes (parfois > 120 km/h), alors qu’à quelques dizaines de mètres, le vent est bien plus faible.

 

 

Macrorafale et Influence de la topographie du terrain sur les rafales de vent

Une macro-rafale (ou macroburst en anglais) est une puissante rafale descendante de vent qui provient d’un orage. Elle touche une zone de plus de 4 km de large et peut causer des dégâts comparables à une tornade, mais sans rotation.

 

🌩 Formation d'une macro-rafale :

Elle se forme quand de l’air très froid et sec en altitude pénètre dans un orage. Cet air descend rapidement vers le sol (refroidi par évaporation de la pluie), accélère, puis s’écrase au sol en provoquant des vents violents qui se dispersent horizontalement dans toutes les directions.

La commune de Viviez se trouve dans une "cuvette" et les reliefs qui entourent la commune auraient pu accentuer les rafales descendantes de l'orage (propulsion du vent).

 

Les violentes rafales descendantes de l'orage s'engouffrent facilement dans les infrastructures causant de gros dommages, c'est ce qui semble s'être produit au stade Camille Guibert de Decazeville : RAPPEL :  la macrorafale est composée de "jets de vent" plus intenses, séparés par des zones un peu moins fortes, ces jets peuvent créer de véritables couloirs où les rafales peuvent atteindre des vitesses extrêmes (parfois > 120 km/h), alors qu’à quelques dizaines de mètres, le vent est bien plus faible.

Une partie des tribunes s'est envolée alors que l'autre partie était quasiment intacte, cela peut donc s'expliquer par un jet de vent plus intense sur cette partie de l'infrastructure. 

 

Influence de la topographie du terrain sur les rafales de vent -> Propulsion des rafales.

Macrorafale


Malheureusement, il est impossible de lister tous les dégâts causés par cet orage, quelques cas de dégâts sur des habitations et sur l'environnement ont été sélectionnées pour ce dossier, mais il est certain qu'il existe de très nombreux cas comme ceux présentés ici.

Sur la trajectoire de l'orage se situait le lieu dit "la boudie" existant sur la commune de viviez qui a subi de plein fouet le phénomène, nous avons réussi à récupérer les précieux témoignages de nombreux habitants et bon nombre d'entre eux affirment que les arbres tombaient d'un coup tout autour des habitations et que certains éléments avaient était projeté à grande vitesse. Nous avons pu récolter le témoignage d'un jeune couple dont la maison a subi d'importants dommages (un seul coté de la maison touché, cas possiblement similaire à celui du stade camille guibert).

Ce couple nous explique avoir vu de nombreux éléments qui semblaient être en rotation autour de la maison, le phénomène s'est produit rapidement. Il est probable que comme pour le stade, un jet de vent plus intense se soit produit sur cette partie de l'infrastructure, n'ayant causé de dommage qu'à un seul morceau du toit et de terrasse. 

Encore une fois, on constate que la plupart des débris semblent avoir été dispersées et il est intéressant de voir que les débris du stade ont été pour la plupart projetées vers la droite et que les débris du cas de la maison situé à "la boudie" ont été projetées vers la gauche (tous les dégâts ne sont pas notés sur cette carte). Les violentes rafales descendantes de l'orage s'abattent au sol et se dispersent. Les éléments sont alors projetés dans tous les sens semant la confusion sur le type de phénomène puis, les couloirs de dégâts sélectifs sèment encore plus la confusion sur le type de phénomène, on observe quelques couloirs de destruction bien définis notamment dans les forets, on observe également des couloirs de destruction sur le stade Camille Guibert ainsi qu'a la boudie sur plusieurs maisons (voir un exemple ci-dessus).

Voici d'autres clichés montrant de nombreux dégâts sur la commune de Viviez (D'autres dégâts ont également été recensées aux communes alentours : Decazeville, Montbazens, Rignac, flagnac, boisse-penchot ..) 

 


Tornade et Macrorafale - différences

Sur la première image, les dégâts ont été causés par une tornade (Possiblement aux États-Unis, il s'agit d'un exemple type, source : https://apollo.nvu.vsc.edu/classes/met130/notes/chapter14/tornado_mb_damage.html), On constate que sur la trajectoire de la Tornade les arbres sont arrachés dans plusieurs directions différentes (vers la droite, vers la gauche.. sur l'image). Cela reflète la circulation tourbillonnaire de la tornade.

Une tornade produit un vent en rotation intense (cyclonique ou anticyclonique) et crée donc des dommages convergents ou en spirale.

 

Sur la deuxième image, on constate que les dégâts sont différents, linéaires. Tous les arbres sont couchés dans une direction uniforme, comme si une vague de vent les avait tous poussés d’un seul côté.

La deuxième image semble être en accord avec ce qu'il s'est passé le 25 juin 2025 dans le département de l'Aveyron

 

(en attente des images drone)

Configuration propice et formation des orages destructeurs du 25/06/25

Pourquoi parle-t-on d'un derecho ?

Le dérécho est un phénomène météorologique violent et étendu, caractérisé par une ligne de violents orages (souvent en arc de cercle) accompagnée de vents destructeurs soufflant en ligne droite sur des centaines de kilomètres. Le terme vient de l’espagnol derecho, qui signifie "droit".

 

(https://www.keraunos.org/actualites/fil-infos/2025/juin/orages-supercellules--grele-vent-derecho-occitanie-massif-central-aquitaine-bourgogne-25-juin-2025)

Les critères d'un derecho sont en effet remplis, entre la limite Gers/Tarn-et-Garonne et la frontière allemande, on relève 58 rafales convectives > 90 km/h avec une distribution temporelleentre 17h30 et 00h30 UTC. Plusieurs de ces rafales, espacées d'au moins 64 km, ont dépassé la barre des 120 km/h (relevés sous anémomètres ou estimés en fonction des dégâts), jusqu'à 135 km/h à Montbeugny. En conséquence, l'axe venteux de l'Occitanie à Lorraine répond aux critères d'un derecho.

On notera que d'autre violentes rafales se sont déclenchées au passage de supercellules, notamment dans l'Eure (126 km/h à Bernay) ou d'un système venteux multicellulaire dans l'Oise (140 km/h à Bailleul-le-Soc).

Dans le département de l'Aveyron, de fortes rafales de vent ont été relevées par les stations météorologiques, cependant, les dégâts observés ne peuvent pas correspondre à des vents compris entre 95 et 99km/h, en réalité et en prenant en compte les dégâts, les vents ont certainement dû être bien supérieurs à 100km/h (On peut estimer que les rafales auraient pu atteindre 130 à 150 km/h, voire localement jusqu’à 160 km/h).

 

Configuration des masses d'air le 25/06/25

Le 25 juin 2025, on relève tout d'abord la présence d'un fort conflit de masses d'air, en effet, une goutte froide en altitude (cut-off) qui était d'abord positionné sur le Portugal est progressivement remontée en direction de l'ouest de la France, elle à par la suite crée un "Thalweg" qui est une zone d'air plus froide en altitude (sur le modèle ECMWF 0.25°, représentant le géopotentiel à 500hPa et la pression au sol, les couleurs rougeâtres représentent les zones de hautes pressions avec un air plus chaud tandis que les zones jaunâtres, bleu, vertes représentent les zones à plus basses pressions ou l'air est plus froid).

Un fort courant jet (jetstream : vent dynamique en altitude) a circulé au-dessus du conflit de masses d'air et était orienté du sud ouest vers le nord-est, La présence de ce courant Jet à permis d'aider l'air chaud et humide à se soulever en altitude. Résultat : des ascendances puissantes se forment, ce qui favorise la formation d’orages violents.

Au sol, l’air était :

  • Très chaud (jusqu’à 40°C)

  • Assez humide (points de rosée autour de 16°C)
    → Cet air chaud et humide était très instable, prêt à "exploser" dès qu’il était soulevé

 

Grâce à la présence d’une zone de convergence des vents au sol, l’air chaud et humide a été forcé de monter.
Cela a permis la formation des premiers orages, qui se sont rapidement organisés en supercellules du fait de l’instabilité marquée et du cisaillement des vents en altitude.

 

Enfin, sous l’effet du vent en altitude et de l’instabilité encore présente, les orages ont changé de structure.
Sur les archives radar du 25 juin 2025, l’orage remontant depuis Auch montre une restructuration en "bow echo" en progressant vers l’Aveyron, signe d’une transition vers un système orageux organisé et très venteux.

(voir explications en haut de la page).

 

 

Lecture des modèles à mailles fines

Certains modèles à “mailles fines” (modèles à résolution élevée) comme “Arome 1.3km” ont pu simuler l’arrivée de ces orages associés à de violentes rafales de vent, d’importantes précipitations et grosse grêle possible.

Les modèles ont également montré une instabilité marquée exprimée en (CAPE) : (Convective Available Potential Energy)  : Il s'agit de l’énergie que l’air chaud a pour monter dans l’atmosphère.

En version simple :  Plus l’air est chaud et humide au sol et froid en altitude, ➡️ plus l’air monte vite, ➡️ plus la CAPE est élevée, ➡️ et plus le risque d’orages violents augmente.

On relève donc des valeurs de CAPE élevées : 1000j/kg à loc. 3000j/kg 

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